Marché des grains Le blé français soutenu par l’exportation
Tallage, cabinet d’études spécialisé dans les marchés des céréales, oléagineux et protéagineux, nous livre son analyse hebdomadaire.
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Les céréales à paille repartent à la hausse cette semaine en France, poussées par les exportations. La tendance est à la baisse en revanche pour le colza et les tourteaux.
Nouvelles ventes de blé français à la Chine
La chute des prix du blé s’est arrêtée, les valeurs repartant même à la hausse au milieu de la semaine, à 187 €/t rendu Rouen en base juillet (+1 €/t), soit 218 $/t Fob. Les esprits se sont partiellement apaisés en ce qui concerne les conséquences de l’épidémie du coronavirus : la situation est grave, mais les conséquences sur l’économie mondiale sont très difficiles à évaluer.
Par ailleurs, la Chine a donné plusieurs indices cette semaine de sa volonté d’importer massivement un grand nombre de denrées alimentaires pour assurer ses besoins. Mais c’est la bonne compétitivité des blés français face aux concurrents argentins et de la mer Noire qui est venue rapidement stopper la baisse des prix.
En effet, après leur affaissement de la semaine dernière, les blés français se sont retrouvés à presque 15 $/t de moins que les blés russes (à 12,5 % de protéines) et 20 $/t de moins que les blés argentins. Cela leur a conféré un net avantage vers plusieurs destinations du pourtour méditerranéen.
Mais ce n’est pas tout : grâce à cette compétitivité, renforcée par la chute des taux de fret, de nouveaux contrats ont été passés avec la Chine cette semaine pour des chargements sur mars-avril. L’ampleur de ces nouveaux achats n’est pas encore certaine, mais il pourrait s’agir de 300 000 à 500 000 tonnes, ce qui pousserait les ventes françaises vers la Chine à nettement plus de 1 million de tonnes pour la campagne en cours.
Léger décrochage des prix du blé russe
Les chiffres douaniers du mois de décembre ont également joué un rôle de soutien : malgré les grèves, 1,2 million de tonnes de blé ont été chargées de France vers les pays tiers en décembre, soit le plus haut niveau depuis le début de la campagne. Et le rythme des sorties est resté élevé en janvier, selon les statistiques portuaires.
La France est donc en route pour une belle performance vers les pays tiers. Néanmoins, son avantage par rapport à ses concurrentes se dégradait à la fin de la semaine, car les prix russes ont fini par lâcher un peu de lest (–5 $/t) à 225 $/t pour la qualité à 12,5 % de protéines. La concurrence de la mer Noire reste à suivre de près.
L’Algérie aux achats en orge
L’orge fourragère suit le blé et remonte de 2 €/t cette semaine à Rouen, à 164 €/t (base : juillet), soit 191,5 $/t Fob. L’Algérie, via son organisme d’État l’OAIC, vient d’acheter 150 000 tonnes d’orge. Vu la compétitivité des orges françaises, qui valaient 6 $/t de moins que les orges de la mer Noire à la fin de la semaine dernière, il n’est pas exclu que la France serve une partie de cette vente.
Cela a soutenu les prix alors que le bilan des orges françaises reste très lourd, il est toujours attendu avec de gros surplus en fin de campagne ; il en est de même pour le bilan mondial. Les prix russes et australiens se sont d’ailleurs affaissés cette semaine, a contrario des prix français.
Peu de changement sur le créneau brassicole, où les prix Fob Creil restent comprimés par l’ampleur des disponibilités à bas taux de protéines, à 158 €/t en base juillet (–1 €/t) pour les orges d’hiver et 161 €/t (stabilité) pour les orges de printemps.
Encore plus de maïs ukrainien
Contrairement au blé et à l’orge, le prix du maïs poursuit sa baisse cette semaine à 169 €/t Fob Rhin (–2 €/t) et 168,25 €/t Fob Bordeaux (base juillet). Alors que le maïs avait mieux résisté que le blé et le soja à la vague baissière sur le marché mondial la semaine dernière, il succombe cette semaine avec l’incertitude des ventes que les USA pourraient effectuer vers la Chine.
Il succombe aussi à la suite d’une révision à la hausse de la production de l’Ukraine (récolte de 2019). Ce pays aurait finalement produit presque autant que l’an passé (35,8 millions de tonnes) et cela vient renforcer ses disponibilités à l’exportation. En raison des relations de prix entre les maïs européens et ceux des pays tiers (de l’Ukraine notamment), les importations de maïs dans l’UE risquent ainsi d’être supérieures à ce qui était attendu au début de la campagne, bien qu’en forte baisse toutefois par rapport au niveau de l’an dernier.
Léger rebond du soja mais baisse des tourteaux
Face à un regain d’optimisme sur les exportations US, les cours du soja trouvaient un peu de soutien cette semaine sur le marché américain (+2 $/t, à 324 $/t). Les exportations hebdomadaires de soja US de la semaine dernière ont été plutôt élevées (à 711 000 tonnes, soit dans la fourchette haute des attentes des opérateurs). Par ailleurs, une vente de 130 000 tonnes de soja US vers l’Égypte a été un élément de soutien supplémentaire.
Enfin, l’annonce de la Chine de réduire de moitié ses surtaxes douanières sur 75 milliards de dollars de produits américains a pu également rassurer les opérateurs. Bien que ce premier pas soit en partie lié à la phase 1 de l’accord commercial entre les États-Unis et la Chine, le marché a accueilli ce geste chinois comme un signal positif dans l’évolution des relations économiques et commerciales sino-américaines.
Du côté de l’Amérique du Sud, les récoltes brésiliennes de soja continuent, avec 9 % des surfaces récoltées la semaine dernière, soit un niveau qui est proche à la moyenne des cinq dernières années. Au niveau du climat, les perspectives météorologiques préservent pour le moment le potentiel de récolte record à l’échelle du pays. Les premiers retours semblent très satisfaisants pour le moment. En conséquence, le soja américain va devoir affronter une forte concurrence du soja brésilien dans les prochaines semaines.
De leur côté, les cours du tourteau de soja se sont repliés (–4,4 $/t, à 318 $/t à Chicago) malgré un léger rebond de la fève. À Montoir, les prix français du tourteau de soja ont poursuivi le même mouvement, mais de façon plus marquée, et cèdent 8 €/t, à 332 €/t. L’arrivée de la récolte sud-américaine apporte une pression sur les cours des tourteaux.
Dans le sillage des tourteaux de soja, les prix du pois fourrager ont baissé de 4 €/t, à 220 €/t départ Marne.
Recul du colza dans le sillage du pétrole
Porté par la baisse de l’or noir, le colza français a perdu 6 €/t en Fob Moselle (à 397 €/t), 5 €/t à Rouen (à 392 €/t) et 3 €/t sur Euronext (à 394 €/t). Le cours du pétrole londonien a plongé d’environ 6 % sur la semaine, face aux incertitudes concernant la demande de matières premières en Chine en raison des mesures sanitaires prises pour limiter la propagation du coronavirus. Ces mesures, limitant les transports de marchandises et de personnes, affectent la consommation de pétrole, ainsi que la production et la consommation de produits agricoles et alimentaires.
Les cours du canola canadien ont été entraînés à la baisse également par les inquiétudes du marché liée à l’épidémie du coronavirus. Ils n’ont pas pu trouver de soutien à la suite de la publication du rapport de Statcan sur les stocks canadiens du canola au 31 décembre. Le bureau de la statistique indique une baisse de stocks de 2,4 % par rapport à la fin de décembre 2018. Malgré ces chiffres, les cours du canola sur le marché à terme canadien ont perdu 5 $/t, à 347 $/t (échéance de mars 2020).
Le tournesol n’a pas résisté cette semaine à la pression baissière du colza, du soja et du pétrole. Le prix du tournesol rendu Saint-Nazaire cède ainsi 12,5 €/t, à 370 €/t. Sur le marché ukrainien, les cours du tournesol sont stables par rapport à la semaine dernière à 405 $/t.
A suivre : compétitivité UE-mer Noire, développement des céréales et du colza dans l’hémisphère Nord, récolte sud-américaine de soja et de tournesol, évolution du conflit commercial US-Chine, évolution des exportations US de soja, impact des mesures sanitaires en Chine sur la demande en matières premières agricoles.
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